Tourrettes (Poésie)

Il y a sur un rocher, un village que j’aime
Où de vieilles maisons ceinturent le château
Elles sont parcourues par d’étroites venelles
Si elles sont si serrées, c’est pour se tenir chaud
Mon enfance a connu toutes  ces vieilles pierres
Montais, descendais, pendant des heures entières
Jouant à cache-cache dans les vieilles paillères
Encore garnies de foin, sur des planchers branlants
Les chaudes après-midi, elles servaient de litières
Mon dieu que c’était bon, nous étions des enfants
Ma sœur un peu plus jeune, participait souvent
Avec les autres filles, on flirtait gentiment
Les journées s’écoulaient à une allure folle
A avoir fait tant de choses, et c’était drôle
Cueillir du bout des doigts figues de barbarie
Dévaler le village, sauter comme un cabri
Parcourir les chemins, s’allonger sur la lauve
Et se déshabillant, se baigner dans les lônes
Le soir, quelquefois sur un mur on parlait
On troublait le silence des chaudes nuits d’été
Où allongés dans l’herbe, le regard vers les cieux
Regarder les étoiles, c’était si beau mon Dieu
J’ai passé mes vacances là- haut tous les étés
Ma grand-mère le soir, bien sûr, nous retrouvait
Avec des joues bien roses, respirant la santé 

En juillet arrivait la fête du village
On montait sur la place un très grand chapiteau
On était frétillants dans ce remue-ménage
A tourner tout autour, on faisait les badauds
Il y avait le bal avec tous ses flonflons
Je glanais quelques sous pour avoir des bonbons
Puis tout se démontait, la fête était finie
La poussière retombait, et c’était l’accalmie
Comme gars de la ville, aux filles je plaisais
Mais Angèle SICARD était ma préférée
On m’offrait des Balto qui partaient en fumée
Ce n’était pas mon fort, mais bien sûr, ça classait
C’est déjà si lointain qu’on en parle au passé
Il est toujours là-haut, mais il a bien changé
Je ne le revois plus qu’une fois par année
Mais oui, c’est mon village, celui de mes ancêtres
Il a un charme fou, qui vaut qu’on s’y arrête
Vous l’avez deviné, bien sûr, c’est çà « Tourrettes »
Qui vous prend par le cœur, et alors quelle fête

Pierre NOBLE
23 septembre 2001

La poésie est une affaire de famille, son père Charles avait créé avec des amis en 1922 une petite revue « les Muses », un mensuel publié à Nice dans lequel il écrivait.